Contexte et enjeux au niveau régional

Les contextes agro-socio-économiques des PTOM, et plus largement de la région océanienne, montrent de grandes similitudes: importance de l’agro-biodiversité et des systèmes de production familiaux, savoir-faire traditionnel, mode de production "bio" peu ou pas valorisé, difficulté d’approvisionnement en intrants, petite taille des économies agricoles, nécessité de s’adapter aux effets du changement climatique/CC (précipitations, cyclones, sécheresses), difficulté d’accès aux marchés et aux informations. Dans ce contexte, les points clés ci-dessous accompagnent l'évolution de l'agriculture dans le Pacifique:
• L’agriculture conventionnelle a atteint ses propres limites et l'insularité en démultiplie les effets contraignants
• Les agriculteurs doivent gérer l'introduction de cultures non traditionnelles ainsi que le besoin de nourrir des populations en constante augmentation et dont les habitudes alimentaires changent ;
• L’agriculture dans les PTOM et en Océanie se retrouve ainsi devant un triple défi : produire plus, tout en préservant la qualité de la ressource en eau et en faisant face à sa raréfaction ;
• L’agriculture traditionnelle était principalement orientée vers la subsistance mais l’augmentation des populations notamment urbaines a fait émerger le besoin important d’approvisionner les marchés domestiques ;
• La situation de l'AB est assez hétérogène dans les PTOM: elle est en cours de structuration et de développement en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie Française et a surtout un caractère vivrier et familial à Wallis & Futuna ;
• Se regrouper entre États et Territoires du Pacifique, pour échanger et mutualiser les ressources, devient une nécessité pour faire face aux défis actuels de la sécurité alimentaire, de la biosécurité, du changement climatique et de la mondialisation des échanges.

Présentation de la Nouvelle-Calédonie et son agriculture :

La Nouvelle-Calédonie, troisième île du Pacifique sud en termes de superficie, après la Papouasie-Nouvelle Guinée et la Nouvelle-Zélande, est située à environ 1500 km à l’est des côtes australiennes et à proximité du tropique du Capricorne.
Le territoire est un archipel composé :
• D’une île principale, la grande terre (400 km sur à peu près 50 km de large coupée sur son axe central par une chaîne de montagne, 88% du territoire)
• des Iles Loyauté, (4 iles à une centaine de Km à l’est)
• de plusieurs petites iles (Iles des Pins, Iles Belep, Chesterfield, ...), réparties tout autour de la grande terre.
La surface agricole utile (SAU) est de 222 200 ha, elle ne représente que 12% de la surface totale du territoire. Cette surface est occupée à 95% par de l'élevage bovin. Avec ses 4 500 exploitations, le secteur agricole représentait moins de 2% du PIB en 2015.
La situation géographique de la NC à la limite de la zone subtropicale, crée une grande diversité de plantes cultivées qui va des plantes alimentaires traditionnelles du Pacifique (tubercules tropicaux, bananes, …) aux productions plus tempérées (carottes, oignons, pommes de terre, …). La couverture des besoins par la production locale de fruits est de 46% et de 70% pour les légumes. Malgré ces chiffres, la consommation en fruits et légumes frais des calédoniens restent bien en deçà des recommandations de l’OMS.
L’agriculture calédonienne est caractérisée par une forte diversité. Elle est tournée principalement vers l’approvisionnement du marché local. Deux agricultures cohabitent et se complètent :
• Une agriculture vivrière pas ou peu marchande d’autoconsommation et pour alimenter les réseaux d’échanges traditionnels. Elle représente une valeur similaire à l’agriculture marchande. Les surplus de production de cette agriculture peu consommatrice d’intrants sont encore peu valorisés sur les marchés agricoles.
• Une agriculture marchande fortement dépendante de l’importation d’intrants (engrais, semences, produits phytosanitaires, …), qui doit s’adapter aux nouvelles attentes des consommateurs (bio,..) tout en augmentant ses volumes pour améliorer la sécurité sanitaire.
La production agricole calédonienne a subi ces dernières années de nombreuses pertes imputables aux changements climatiques : longues périodes de sécheresse impactant les élevages et la production de céréales, épisodes de pluies intenses favorisant la destruction directe et les phénomènes de pullulation de ravageurs sur les productions maraîchères. Le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a ainsi lancé l’élaboration d’une politique de l’eau en associant ses utilisateurs (agriculteurs, collectivités, industries) et la société civile, pour améliorer sa gestion quantitative et qualitative.
Les politiques publiques calédoniennes avec l’appui des organisations professionnelles, visent à augmenter l’autosuffisance alimentaire du Pays tout en prenant en compte la protection d’un environnement fragile (lagons classés au patrimoine mondiale de l’Unesco).

Présentation des acteurs

La Chambre d’agriculture de Nouvelle-Calédonie est en charge de l’animation et de l’accompagnement à la professionnalisation des agriculteurs (mise en place de groupements de défense sanitaire animale et végétale, mise en place d’organisations agricoles, …). La Chambre consulaire s’est dotée d’un service de coopération régionale pour développer à la fois la coopération technique et les échanges économiques entre les PTOM de la région et les pays environnants (Fidji, Australie, Vanuatu, …).
La Nouvelle-Calédonie possède un institut de recherche : l’Institut Agronomique Calédonien (IAC) qui a des collaborations au niveau national avec le CIRAD (partenaire scientifique historique et privilégié) ainsi qu’avec des organismes régionaux (Plant and Food Research-NZ, CSIR, …)
La Technopole de Nouvelle-Calédonie (ADECAL Technopole) a été créée fin 2011 pour faire de l’innovation un levier de développement, de diversification de l’économie calédonienne par la valorisation des ressources biologiques marines et terrestres. Son pôle terrestre possède quatre centres spécialisés sur les céréales, le maraîchage, les tubercules tropicaux et l’apiculture. Le pôle marin possède 3 centres spécialisés sur la production de crevettes, les micro-algues et l’aquaculture.
Enfin le partenariat regroupe également les acteurs du monde agricole (Bio Calédonia, REPAIR, Interprofessions, DAFE, services techniques des provinces,) et la formation agricole (Lycées Michel Rocard et Do Néva).

Présentation de Wallis et Futuna et son agriculture :

Wallis et Futuna (Uvea mo Futuna) est un archipel composé de trois iles principales : Wallis (75,64 km²), Futuna (46,28 km²) et Alofi (17,78km², inhabité). L’archipel et situé à 370 km des Samoa américaines pour Wallis et 285 km au nord-ouest de Fidji pour Futuna. Les iles qui comptaient 12 197 habitants en 2014, ont perdu un tiers de leur population entre 2003 et 2013 principalement vers la Nouvelle-Calédonie et la métropole.
Wallis & Futuna se caractérise par une économie traditionnelle où l’autoconsommation est importante. L’agriculture, en majorité de type familial, occupe une place importante tout en étant peu intégrée dans l’économie marchande. La pluriactivité (agriculture, élevage, pêche, artisanat) est pratiquée couramment avec pour vocation première la satisfaction des besoins familiaux et coutumiers.
L’agriculture familiale pratiquée par plus de 80% de la population est caractérisée par un système de polyculture élevage conjuguant les pratiques de l’agroforesterie, une forte biodiversité et un recours très limité aux intrants. Les secteurs de l’agriculture de de la pêche n’emploient que 0.2 % des salariés déclarés et que 0.7 % des crédits octroyés par les établissements financiers.
Conformément au Plan Pluriannuel de Développement Durable du secteur primaire de la Direction des Services de l’Agriculture, la professionnalisation d'exploitations individuelles ou familiales de type polycultures-élevage ou plus spécialisées, constitue un modèle de développement adapté au territoire. Les enjeux actuels et futurs de ce territoire sont :
• Santé : Sensibilisation pour faciliter l’adoption de bonnes pratiques alimentaires ;
• Formation, démonstration et transfert : Accompagnement des acteurs du secteur primaire (agricole) par la mise en place d’un réseau d’échanges des bonnes pratiques ;
• Développer et encourager l’initiative locale : Soutien aux investisseurs pour la création d’emplois dans le secteur primaire ; Maintien des jeunes et aide aux retours des exilés ; Constitution de filières de production et d’exportation de niche, par la valorisation des ressources endémiques ;
• Concilier production et respect des écosystèmes : Adapter et développer les productions agricoles, halieutiques et forestières aux besoins du marché local ; Développer des activités de transformation, de stockage et de mise en marché ; Réduction des impacts des activités agricoles, valorisation des déchets et sous-produits, gestion durable des ressources naturelles ; Lutte contre les espèces invasives.

Présentation des acteurs

La Direction des Services de l’Etat et du territoire de l’Agriculture, de la Forêt et de la Pêche est chargée d’appliquer la politique agricole, forestière, de développement et d’aménagement rural. Leurs missions concernent :
• l'attribution des aides à l'agriculture, l'organisation des filières agricoles, les appuis techniques et la formation;
• le développement de la filière bois;
• le développement de la formation pour lequel la direction est l'autorité académique de l'enseignement agricole;
• la sécurité alimentaire, la protection et la santé animale et le contrôle phytosanitaire aux frontières
La Chambre de Commerce, d’Industrie, des Métiers et de l’Agriculture (CCIMA) assure l’accompagnement à la professionnalisation des agriculteurs via l’appui au montage de projet, de demande de financement, la mise en œuvre d’actions de formation et l’apport de conseils techniques aux professionnels des trois filières (productions végétales, élevage et pêche). La CCIMA gère le marché territorial de la Malae Mahu, où sont écoulés une partie des productions locales.
Le Lycée professionnel agricole (LPA) a accueilli 75 élèves en 2017. Il participe à la formation initiale et continue des agriculteurs, et à l’expérimentation et la diffusion de bonnes pratiques.

Le dispositif RITA à Wallis & Futuna

Le territoire de Wallis-et-Futuna a bénéficié d’un dispositif RITA (2014-2016), afin de palier à l’absence d’organismes de R&D, d’instituts techniques et d’établissements d’enseignement supérieur. L’objectif était d’accompagner les acteurs locaux dans une démarche de développement local des productions animales et végétales en co-construisant et en réalisant des actions de R&D (expérimentation/démonstration/transfert) en réponse aux besoins des professionnels. Les axes de travail ont concerné : l’approvisionnement en produits frais (fruits, légumes, viande…) et la valorisation des produits agricoles (huile de coco),

Présentation de la Polynésie Française et son agriculture :

La Polynésie Française est composée de 118 îles dispersées sur un territoire vaste comme l’Europe et représentant 3 500km² de terres émergées dont environ un tiers sont des récifs coralliens.
La surface utilisée pour l’agriculture représente 10 % des terres émergées de ce territoire correspondant à 39 000 ha reparties en 29 000 ha de cocoteraies, 7 000 ha en pâturages et 3 000 ha consacrés essentiellement à des cultures maraîchères, fruitières et vivrières alimentant le marché local de produits frais.
Les îles de Tahiti et Moorea concentrent 75 % des 270 00 habitants de ce Pays d’Outre-Mer. Aujourd’hui, le polynésien calque de plus en plus son mode de consommation sur celui du métropolitain ou du nord-américain. 11 % de la population active travaille dans l’agriculture soit environ 15 000 personnes.
  • L’agriculture polynésienne couvre aujourd’hui environ 25 à 30% de la consommation de produits alimentaires, tous produits confondus, si l’on se réfère aux produits commercialisés. Considérant la production agricole et production issue de la pêche lagonaire autoconsommée, particulièrement développée dans les zones rurales, la part de la production locale dans la consommation de biens alimentaires est évaluée à 50%.
En 2012, l’agriculture polynésienne comprenait 3 grands types d'exploitations selon leurs objectifs, leurs rapports au marché et leur impact sur l’environnement :
• Des exploitations de toute taille, tournées vers le marché de produits agricoles frais (fruits, légumes, produits vivriers, élevage porcins, œufs, lait, miel), principalement situées dans les îles de Tahiti et Moorea et en plus petit nombre dans les archipels des Iles sous le vent et îles Australes. Leur nombre est estimé à environ 500.
• Des petites exploitations familiales fonctionnant sur une logique d’autosubsistance, produisant des biens autoconsommés et quelques productions commercialisées de manière régulière. Ces exploitations sont situées dans toutes les zones rurales des 4 archipels des Iles du vent, Iles sous le vent, Marquises et Australes. Le nombre d’exploitations concernées est d’environ 4 000.
• Des exploitations agricoles tournées exclusivement vers la production de coprah, situées dans l’archipel des Tuamotu-Gambier, bénéficiant du soutien public mis en œuvre sur la filière, comprenant un dispositif de commercialisation à prix garanti et de prise en charge des coûts de transport vers l’huilerie de Tahiti. On dénombre environ 1100 exploitations consacrées exclusivement à la récolte du coprah dans cet archipel.
L’activité agricole peut avoir des impacts environnementaux significatifs, notamment dans le milieu lagonaire où des traces de résidus de pesticides agricoles ont été retrouvées. Les pouvoirs publics qui conduisent une politique de développement agricole soutiennent aujourd’hui une agriculture à faible consommation d’intrants chimiques, privilégiant les méthodes de lutte biologique (auxiliaires de culture, piégeage, etc..) et la fertilisation organique. Un effort important est effectué auprès des agriculteurs conventionnels afin qu’ils mettent en œuvre de bonnes pratiques en matière d’usage de pesticides et utilisation d’engrais.

Présentation des acteurs

La Direction de l'Agriculture est dotée d'une compétence générale d'organisation, de proposition, d'information et d'accompagnement dans le domaine de l'agriculture et de la forêt. Elle a pour mission de concevoir, mettre en œuvre, contrôler et évaluer les programmes, les actions, les dispositions réglementaires et les mesures de soutien budgétaire qui :
• favorisent le développement économique de l'agriculture et de la forêt en contribuant au renforcement des capacités de production durable, de valorisation et d'innovation des filières de production;
• contribuent à renforcer l'organisation économique des filières et leur adaptation aux marchés locaux et extérieurs;
• participent au développement des archipels en favorisant la mise en valeur des ressources agricoles et forestières de ces territoires.
La Chambre d’Agriculture et de la Pêche Lagonaire (CAPL) a été créé en 1884, c’est la doyenne des institutions de Polynésie Française. Elle est un lieu de concertation pour tous les acteurs et agent actif dans le monde agricole. La Chambre est l’interlocuteur privilégié des instances publiques et le représentant des intérêts du monde agricole et de la pêche lagonaire.

Présentation du partenariat RITA dans les PTOM du Pacifique :

Les PTOM du Pacifique ont émis le vœu de rejoindre le réseau RITA dès 2016, partant du constant que leurs agricultures insulaires tropicales répondent à des enjeux similaires à celles de DOM. De par leurs statuts, les PTOM ne sont pas éligibles aux fonds finançant les actions du RITA dans les DOM, cependant le démarrage fin 2018 du XI Fonds Européens de Développement (FED) offre des perspectives pour participer activement au RITA. Le FED financera sur 4 ans, un programme d’accompagnement de l’agriculture des PTOM dans la transition agroécologique et le soutien au développement de l’agriculture biologique.
Pour les productions végétales, les actions RITA s’organisent autour des thèmes suivants afin d’élaborer et de diffuser des références technico-économiques sur :
• la fertilisation organique et la valorisation des effluents d’élevage
• le développement de l’agroforesterie
• la gestion des bioagresseurs et des auxiliaires
• la production et la diffusion de matériel végétal sain
• la gestion innovante de l’eau (en particulier sur environnement sensible comme les atolls)
• la filière cocotier (gestion durable et renouvellement des cocoteraies)
Pour le secteur animal, les secteurs retenus sont :
• L’élevage des monogastriques avec un volet important sur l’alimentation (valorisation ressources locales)
• Les aspects sanitaires et la gestion des fourrages en élevage bovin
• L’apiculture
Enfin deux axes transversaux ont été retenus :
• Les systèmes alimentaires des territoires, enjeux approvisionnement en produits locaux et lutte contre les maladies non transmissibles
• La structuration de la filière agriculture biologique (certification, transformation, …)


Contact en Nouvelle-Calédonie :
François JAPIOT
Chambre d’agriculture Nouvelle-Calédonie
francois.japiot@canc.nc
Tel : 00 687 76 16 91

Contact à Wallis & Futuna :
Amalia FOTOFILI
Direction des services de l'Agriculture, de la forêt et de la pêche
amalia.fotofili@agripeche.wf
Téléphone: 00 681 72 04 07

Contact en Polynésie Française :
Maurice WONG
Direction de l’agriculture
maurice.wong@rural.gov.pf
Tel : 00 689 40 54 26 80

Mise à jour : 23 septembre 2019